La Balançoire De Pâques (Témoignage de Mme Irini K. Vlastari)

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Kythnos accueille Pâques en portant ses plus beaux vêtements, les Lambriàtika. Au Dimanche de Pâques, sur le place Christou du chef-lieu, la balançoire est déjà mise en place. Garçons et filles, vêtus d’habits traditionnels, viennent s’y balancer. La coutume est remise à l’ordre du jour grâce à l’association culturelle de la Chora (chef-lieu) Le balancement sur la balançoire, que l’on appelle mamouni dans le dialecte local, était l’occasion pour les jeunes célibataires du siècle précédent de se rencontrer, étant donné l’austérité des mœurs de l’époque. Habituellement, c’étaient les jeunes filles célibataires qui s’asseyaient sur la balançoire et se faisaient balancer par les jeunes hommes. Celui qui balançait une jeune fille s’engageait devant Dieu et les hommes de l’épouser. Les balançoires étaient mises en place dans les quartiers et sur les places et les jeunes se rendaient d’une balançoire à l’autre, à la recherche de la jeune fille qui les intéressaient, pour la balancer et lui chanter, exprimant ainsi publiquement leur intérêt amoureux.

Le rituel de la balançoire remonte à la Grèce Antique et est lié au mythe tragique d’Icarios qui, un soir, offrit l’hospitalité à Dionysos. Satisfait de l’hospitalité qui lui avait été offerte, Dionysos enseigna à Icarios la culture de la vigne et la production du vin. Plus tard, sans le vouloir, Icarios offrit du vin à des bergers qui furent ivres. Croyant qu’il les avait empoisonnés, les bergers le tuèrent. La fille d’Icarios, Érigoné, enterra le corps de son père sous un arbre et, envahie par la tristesse, se suicida en se pendant aux branches. Avant de rendre son dernier souffle, elle jeta un sort contre les jeunes filles des athéniens leur « souhaitant » d’avoir le même sort. En effet, après le suicide d’Érigoné, plusieurs jeunes filles d’Athènes se suicidèrent de la même façon. Les athéniens s’adressèrent à l’oracle de Delphes pour savoir ce qu’ils devaient faire. L’oracle répondit qu’ils devaient instituer une fête en l’honneur d’Icarios et Érigoné, de sorte à se faire pardonner et de mettre fin à la colère de Dionysos. La fête fut nommée Aiora (qui signifie balançoire) et avait lieu le jour des Choès. Choès était le nom du deuxième jour de la fête athénienne des Anthestiria, qui avaient lieu au début du printemps et duraient trois jours. Ce jour-là, les jeunes athéniennes se balançaient sur des balançoires suspendues aux branches d’arbres. Un ancien vase porte la représentation d’un Satyre (fidèle acolyte de Dionysos) qui pousse une balançoire sur laquelle est assise une jeune fille. Au fil du temps, la fête de l’Aiora fut reprise par les sociétés rurales de Grèce et des Balkans qui en firent la coutume de la Balançoire.

Cette coutume se retrouve également dans toute la Grèce, principalement dans les îles de la mer Égée et, bien entendu, dans les Cyclades. Elle devint une des fêtes du printemps, marquant la vie agricole. Le balancement revêtait un caractère apotropaïque, c’est-à-dire, détournant le malheur, et l’on considérait que le mouvement de la balançoire vers le ciel portait bonheur. En outre, ce même mouvement symbolisait la renaissance de la nature, avec l’arrivée du printemps. Il s’agissait d’une catharsis par l’air, qui assurait la bonne santé, les bons fruits et la fertilité.

Les balançoires remplissaient également une fonction sociale fondamentale, offrant aux jeunes filles et garçons une des rares occasions de se rencontrer « légalement », de poser leurs choix en matière de partenaire, d’exprimer mutuellement, par leurs chansons pleines de symboles amoureux qui créaient l’ambiance adéquate, les préférences et leurs sentiments. Ainsi, la coutume est accompagnée de chansons et de vers amoureux, fortement empreints de lyrisme. À Kythnos, lorsque les jeunes se balancent, les autres chantent :

Que Pâques est joli,

lorsqu’on prépare les balançoires,

où se balancent les blondes

et celles aux cheveux noirs.

Je me balance avec votre cœur

et je vous paierai

je sortirai de ma poche

une pomme à vous offrir.

Qu’elle est gracieuse, Katernio,

qui se balance

et son amour est là

et lui chantera des chansons.

Je te balancerai ma mie

et ta mère te voit

et dans son cœur

elle secrètement fière de toi.

Le girofle se balance,

se balance la belle prestance,

se balance aussi Annoussio,

la fille d’Annezio, les jeunes hommes qui vous balancent

sont si gracieux,

que Dieu donne

que vous deveniez couple.

Tiens bien la balançoire,

n’ait pas crainte

et je te dirai des compliments

dont tu te souviendras longtemps.

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